Alors que des centaines de personnes continuent de mourir en mer Méditerranée centrale, le Geo Barents vient d’être immobilisé par les autorités portuaires italiennes, alerte Médecins Sans Frontières (MSF). Les navires de sauvetage d’ONG sont à nouveau la cible d’un harcèlement administratif derrière lequel se dissimulent des motivations politiques.
Suite à une inspection de 14 heures dans le port d'Augusta, en Sicile, le 2 juillet 2021, le navire de recherche et de sauvetage en mer de MSF, le Geo Barents, a été immobilisé après que 22 défaillances ont été identifiées, dont 10 ont motivé l'immobilisation du navire. MSF est prête à réaliser tous les ajustements nécessaires, mais cette inspection représente d’abord une opportunité de stopper les opérations de secours sous couvert de procédures administratives.
MSF, qui a lancé le Geo Barents en mai, a entièrement équipé et certifié le navire pour effectuer des activités de recherche et de sauvetage, en respectant toutes les règles et réglementations mises en place par les autorités maritimes compétentes.
Les équipes du Geo Barents ont effectué une série de sauvetages entre le 10 et 12 juin, secourant 410 personnes dans une situation d’épuisement et de vulnérabilité extrêmes. Parmi elles se trouvaient 16 femmes, dont six voyageaient seules et une était enceinte, ainsi que 101 mineurs non accompagnés. La plupart de ces personnes venaient de pays déchirés par la guerre, comme la Syrie, l'Éthiopie, l'Érythrée, le Soudan et le Mali.
Depuis lors, un naufrage a eu lieu le 30 juin dernier à quelques kilomètres des côtes de Lampedusa, et des rapports ont fait état d'un autre naufrage au large de la Tunisie. Des corps de femmes et d'enfants se sont échoués sur les côtes libyennes. Depuis le début de l'année 2021, au moins 721 personnes ont perdu la vie ou ont disparu en tentant de franchir la frontière maritime la plus meurtrière au monde.
Outre une série d'irrégularités mineures facilement rectifiables, les autorités italiennes contestent l'aptitude du navire à mener toute activité de recherche et de sauvetage, et allèguent que le navire comptait trop de personnes à son bord. Le droit international ne prévoit néanmoins pas de classification spécifique pour les navires de sauvetage. En effet, conformément au devoir des capitaines de navire de porter assistance aux personnes en détresse en mer, les opérations de sauvetage sont considérées comme des situations de force majeure.
« Bien que légitimes, ces contrôles portuaires sont aujourd’hui instrumentalisés par les autorités étatiques pour cibler les navires des ONG et empêcher les opérations de secours. Il s’agit là de motivations purement politiques », déclare Duccio Staderini, représentant MSF pour la Recherche et le Sauvetage en mer (SAR). « Pendant que les navires d’ONG humanitaires sont détenus, des vies continuent d'être inutilement perdues en Méditerranée », ajoute-t-il.