Gaza : Les ordres d'évacuation et les déplacements forcés empêchent la continuité des soins aux blessés

Rafah Indonesian Field Hospital
« Quand l'hélicoptère a commencé à tirer, je me suis fait tirer dessus. J'ai été transporté à l'hôpital en âne. A cause de ma blessure, je suis resté 10 jours à l'hôpital, où ils ont installé un dispositif métallique dans ma jambe gauche », raconte Ahmed Fathi Ahmed Salah. Il vit désormais dans une tente proche de l'hôpital indonésien de Rafah où l'eau s'infiltre en cas de pluie.  © MSF

Quelque 1,5 million de personnes ont été poussées par la guerre vers le sud de la bande de Gaza. A Rafah, la plupart des habitants ont été déplacés à plusieurs reprises, emportant avec eux le peu de biens qui leur restait. Dans ces conditions, la réponse médicale de MSF ne fait qu'effleurer les besoins énormes de la population en matière de soins médicaux, alors que les autorités de santé locales rapportent près de 70 000 blessés depuis octobre 2023.

 

Chaque parcelle de terrain disponible dans les rues et terrains vagues de la ville de Rafah et ses environs est désormais envahie de tentes en plastique. Aujourd'hui, il n'y a plus d'espace : les voitures peuvent à peine circuler dans les rues surpeuplées, et même marcher peut s'avérer difficile. Les personnes déplacées dans la zone n'ont pas accès aux éléments les plus fondamentaux - notamment l'eau, la nourriture et un abri - et ont été soumises à des ordres d'évacuation répétés ainsi que des déplacements forcés de la part de l'armée israélienne.

Un traitement de longue durée

À l'hôpital indonésien de Rafah, les patients pris en charge par les équipes de MSF présentent en grande majorité des traumatismes et des brûlures liés à la guerre qui nécessitent des soins continus et durables.

« La plupart des blessés ont besoin de pansements au moins deux fois par semaine, ainsi que d'antibiotiques, d'analgésiques et de soins médicaux constants, explique Guillemette Thomas, coordinatrice médicale de MSF. Si la blessure est grave, le patient a également besoin de physiothérapie pour éviter de perdre la fonctionnalité du membre concerné ».

La plupart des patients de MSF sont hébergés dans des tentes ou des bâtiments publics transformés en abris, où leurs conditions de vie désastreuses rendent presque impossible le nettoyage des plaies ouvertes. Le risque élevé d'infection est l'un des principaux problèmes auxquels sont confrontés les patients blessés à Rafah. Sans traitement médical approprié, les infections peuvent se propager dans le corps, y compris jusqu'aux os, ce qui est très douloureux et peut conduire à la mort.

Depuis mi-décembre 2023, les équipes MSF de l'hôpital indonésien de Rafah soutiennent les services post-opératoires, hospitaliers et ambulatoires, en fournissant des pansements et de la physiothérapie et en réalisant de petites interventions chirurgicales. Jusqu'à présent, elles ont assuré plus de 5 800 consultations et admis plus de 200 patients. Dans le service ambulatoire, environ 60 % des patients souffrent de traumatismes alors que les 40 % restants présentent des brûlures liées à la guerre. Plus de 40 % des patients du service ambulatoire sont des enfants.

Catastrophe humanitaire imminente avec l'escalade des attaques à Rafah

La semaine dernière, les autorités israéliennes ont fait part de leur intention d'évacuer les habitants de Rafah et de lancer une offensive terrestre dans la région. Les attaques se sont intensifiées et les personnes réfugiées dans l'extrême sud de Gaza craignent pour leur vie.

Pour les patients qui ont besoin de soins continus pour des blessures traumatiques ou des brûlures, un autre déplacement forcé pourrait entraîner de graves complications de santé, voire la mort.

« Lorsque les hôpitaux sont évacués, nous avons constaté que les patients partent à pied, en fauteuil roulant ou même allongés dans des lits d'hôpitaux, explique Guillemette Thomas. Cela peut être extrêmement dangereux pour eux. Lorsqu'une personne avec une fracture grave de la jambe commence à marcher, cela compromet sa possibilité de retrouver sa mobilité et peut avoir des conséquences mortelles. »

Vue d'une salle de l'hôpital indonésien de Rafah dans lequel travaillent les équipes MSF. 28 décembre 2023. 
 © MSF
Vue d'une salle de l'hôpital indonésien de Rafah dans lequel travaillent les équipes MSF. 28 décembre 2023.  © MSF

Depuis le début de la guerre, les équipes médicales de MSF et leurs patients ont été contraints d'évacuer dix hôpitaux différents à Gaza, après avoir essuyé des tirs de chars, d'artillerie, d'avions de chasse, de snipers et de troupes au sol, et/ou après avoir fait l'objet d'un ordre d'évacuation. Du personnel médical et des patients ont été arrêtés, maltraités et tués.

Prodiguer des soins médicaux et accroître la réponse humanitaire ont été rendus presque impossibles par l'intensité des bombardements et des tirs d'artillerie israéliens sur Gaza, ainsi que par les combats intenses qui s'y déroulent. Les équipes de MSF sont extrêmement inquiètes de l'escalade de la violence à Rafah et de l'évacuation imminente de la zone, où des millions de personnes sont réfugiées, y compris des blessés, des malades, des personnes âgées et des personnes à mobilité réduite.

« Les gens ont tout perdu - leurs maisons, leurs proches, les moyens de subvenir à leurs besoins essentiels et leur sécurité - et maintenant ils survivent à peine, vivant dans des tentes en plastique boueuses ou sur le sol des hôpitaux et des écoles, sans rien, explique Lisa Macheiner, coordinatrice de projet pour MSF. Rafah et l'ensemble de Gaza ont besoin d'une réponse humanitaire sûre et à plus grande échelle. »

Les équipes de MSF continuent de fournir des soins médicaux à Rafah dans quatre hôpitaux, une clinique et deux postes de santé, ainsi que dans un hôpital de la zone centrale de la bande de Gaza. Cependant, sans l’arrêt des bombardements incessants et des déplacements forcés, il est presque impossible de fournir une aide humanitaire. Nous réitérons notre appel à un cessez-le-feu immédiat et durable, seul moyen de mettre fin à la catastrophe humanitaire qui se déroule à Gaza.

Notes

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