Les cinq principaux obstacles qui freinent les progrès de la lutte contre les MTN
1. L’instabilité et les guerres compromettent les avancées dans la lutte contre les MTN.
Lorsqu'un conflit éclate, les maladies tropicales négligées le sont d’autant plus. Des systèmes de santé déjà fragiles s'effondrent, la surveillance est interrompue et des maladies autrefois sous contrôle peuvent revenir avec force.
Au Soudan par exemple, la leishmaniose viscérale est présente dans plusieurs régions du pays. Or une guerre civile dévaste le pays depuis plus d’un an et demi et plonge le pays dans une grave crise nutritionnelle. Ces conditions sont propices à des flambées épidémiques de cette maladie. Les équipes MSF se tiennent ainsi prêtes à répondre et aider le ministère de la Santé à réagir rapidement.
2. Le manque de financement reste un problème majeur
Les financements se concentrent aujourd’hui sur cinq Maladies tropicales négligées - l'éléphantiasis, le trachome, la cécité des rivières et les vers intestinaux - car elles peuvent être traitées rapidement par des distributions massives de médicaments à un grand nombre de personnes à la fois et sont donc très appréciées des bailleurs de fonds. Pour les 16 autres maladies négligées, les méthodes permettant de les combattre sont plus complexes et/ou plus coûteuses, et les fonds alloués beaucoup plus limités. L'OMS a estimé qu'il manquait deux milliards de dollars pour lutter contre les MTN pour la seule période 2023-2025, sans compter le coût des médicaments.
Les bailleurs de fonds internationaux tels que la France, le Royaume-Uni, l'Union Européenne et les pays du BRICS pourraient avoir un impact significatif. Mais ils ont réduit leur financement au lieu de le maintenir voire de l’augmenter dans le cadre de leurs engagements pour la lutte contre ces maladies associées à la pauvreté.
3. Les morsures de serpent restent les plus meurtrières : les antivenins sont rares, peu efficaces et leurs prix exorbitants
La plupart des victimes de morsures de serpent restent sans traitement, parce qu’elles vivent loin d’un centre de santé disposant d’un antidote et qu’en plus ceux-ci sont trop chers. Non seulement, les antivenins sont produits en faible quantité mais leur efficacité n'est souvent pas optimale, ce qui oblige les patients à acheter plusieurs doses. L’efficacité de l’antivenin doit être évaluée par chaque pays qui l’utilise, mais ces évaluations sont parfois impossibles dans des systèmes de santé déjà saturés. En 2017, l'OMS a lancé une évaluation des produits existants - en demandant des échantillons à différents fabricants – et communique les résultats au fur et à mesure de leur audit. Cette initiative devrait permettre à terme aux fabricants d’améliorer la qualité de leurs produits.
4. Les tests de diagnostic pourtant indispensables restent insuffisants
Une surveillance continue, grâce à des outils de diagnostic, est indispensable pour endiguer les MTN. Or, de nombreux tests restent peu fiables. Les tests de diagnostic des MTN bénéficient d'un soutien financier bien plus limité que ceux des autres maladies. Or Il est crucial que les diagnostics puissent être accessibles au plus près des communautés : la capacité de diagnostiquer efficacement ces maladies à un stade précoce et d'initier un traitement rapide est indispensable pour les patients et la prévention de la maladie.
Si les traitements de nombreuses MTN sont produits par de grands laboratoires pharmaceutiques comme GSK, qui peuvent en faire don par exemple, avec l’objectif d’améliorer leur image, ce n’est pas le cas des entreprises, plus modestes, qui produisent les tests de diagnostic. Par ailleurs, il n'existe pas de mécanisme global d'accès aux tests de diagnostic pour les MTN, chaque État doit donc acheter les siens.
5. La diminution du financement de la recherche sur les MTN, un obstacle pour la R&D
Ces dernières années, les financements pour la recherche et le développement sur les MTN ont baissé. Si cette tendance se poursuit, les dernières phases de grandes innovations médicales seront compromises. Les essais en phase finale sont coûteux et, sans financement, les nouvelles molécules destinées à traiter les MTN n'ont aucune chance d'être mises sur le marché.
La leishmaniose viscérale, la dengue et la maladie de Chagas, par exemple, disposent de nouvelles molécules prêtes pour les essais cliniques, et un vaccin contre la schistosomiase en est également aux premiers stades de développement. Les morsures de serpent sont une autre MTN pour laquelle des essais cliniques pourraient bientôt commencer. L'avenir de tous ces progrès est aujourd'hui en suspens.