L'une des personnes décédées était une femme âgée souffrant d'hypertension, sans que l’on sache si sa mort est liée à l'impossibilité de prendre ses médicaments. Un Syrien, également décédé, avait besoin de soins médicaux qu’il ne pouvait pas recevoir en Turquie. Après plusieurs années dans ce pays, il avait décidé de prendre la mer avec sa fille, qui travaillait comme interprète dans un hôpital. Un enfant de 11 ans est également décédé. Il voyageait sans ses parents. Les corps des défunts ont été traités selon les traditions religieuses, puis jetés par-dessus bord. « Au bout de trois ou quatre heures, leurs corps commençaient à sentir mauvais à cause du soleil et de la chaleur, raconte un rescapé. Nous avons prié, lavé leurs corps avec de l'eau de mer et essayé de les couvrir avec ce que nous avions sous la main. »
Alors qu'ils continuaient à dériver, les survivants ont été dépassés par un certain nombre de navires de taille plus importante. Chaque fois que cela s'est produit, le groupe s’est senti porté par l’espoir d’un sauvetage, avant de réaliser que les navires ne faisaient que passer. « Un seul navire s’est approché de nous. L’équipage a jeté de la nourriture et des bouteilles dans notre direction, mais tout est tombé à l’eau, hors de notre portée. Cela a anéanti nos espoirs de survie », témoigne un rescapé.
Après 15 jours en mer, dont 7 jours sans eau ni nourriture, les survivants ont finalement été secourus par un navire marchand, puis transférés sur un navire des garde-côtes italiens et débarqués à Pozzallo. « Quand le navire marchand a été assez près de nous, j'ai sauté à l'eau, raconte un rescapé. Je ne sais pas où j'ai trouvé la force, mais j'ai sauté pour essayer d'atteindre ce bateau. Pendant que j'étais dans l'eau, j'ai croisé le regard d'une personne à bord et, à son regard, j'ai réalisé qu’il avait un cœur. C'est comme ça que ça s'est passé, le bateau a fait demi-tour et nous a aidés. Ils nous ont donné des œufs, des pommes de terre, des légumes et de l'eau. Nous avons finalement été sauvés. »