« C’est un jour sombre, déplore Nelke Mander, Directrice générale de MSF. Non seulement l’Europe a renoncé à fournir des moyens de recherche et de secours, mais elle a aussi sciemment saboté les tentatives d’autres acteurs de sauver des vies. La fin de nos opérations à bord de l’Aquarius signifie davantage de morts en mer, des morts évitables et sans témoin. »
Les attaques menées ces 18 derniers mois par certains États européens à l’encontre des opérations humanitaires de recherche et de sauvetage sont comparables aux méthodes utilisées par des États parmi les plus autoritaires. En dépit de notre collaboration continue avec les autorités, le pavillon de l’Aquarius a été retiré deux fois cette année, et nous faisons maintenant face à des allégations grotesques de trafic de déchets et d’activité criminelle. Les personnes en détresse sont abandonnées en mer pendant des semaines, privées d’accès à des ports sûrs et de l'assistance d’autres navires.
L’arrêt forcé des opérations menées par l’Aquarius arrive à un moment critique. On estime que 2 133 personnes sont décédées en Méditerranée en 2018, et les départs depuis la Libye représentent la grande majorité des cas. Les gouvernements européens ont contribué à ces événements tragiques en soutenant les garde-côtes libyens pour intercepter les personnes en mer - plus de 14 000 cette année - et les ramener de force en Libye, ce qui constitue une violation du droit international. En 2015, l’Europe s’est engagée auprès du Conseil de sécurité des Nations unies à ce qu’aucune personne sauvée en mer ne soit obligée de retourner en Libye.
« Aujourd’hui, l’Europe soutient directement les retours forcés et revendique des « résultats » sur la question migratoire, indique Karline Kleijer, responsable des urgences chez MSF. Soyons clair sur ce que sous-entendent ces résultats : un manque d’assistance en mer qui permettrait de sauver des vies ; des enfants, des femmes et des hommes renvoyés à une détention arbitraire sans aucune chance d’en réchapper ; et la création d’un environnement qui décourage tous les bateaux de répondre à leurs obligations de porter secours aux personnes en détresse. »