Il n’y a pas assez de mots pour décrire ce que nous vivons. La situation sanitaire dans le camp s’est gravement détériorée. Chaque jour, nous perdons un ou plusieurs patients à l’hôpital. Ça se voit dans le regard des médecins. Un silence s’installe dans l’équipe. Nul besoin de parler, nous savons.
Les victimes sont de jeunes enfants de moins de cinq ans. Ils arrivent sévèrement malnutris à l’hôpital et affaiblis par la diarrhée. Médecins et infirmières travaillent nuit et jour pour les maintenir en vie, mais la plupart du temps leur santé est bien trop fragile.
A mesure que la population du camp s’accroît, les maladies liées au manque d’hygiène gagnent du terrain. Il n’y a pas assez de latrines ; il n’y a pas assez de savon. Quand il pleut, une grande partie du camp est inondée. Les enfants souffrant de diarrhées perdent rapidement du poids et leur système immunitaire est affaibli. Une visite à l’hôpital peut être une expérience assez bouleversante, rencontrer ces enfants dont la peau pend de leurs membres décharnés et maigres comme de fragiles roseaux. Certains ne bougent presque plus. C’est une image que l’on n’oublie pas.
Autour de l’hôpital, l’activité est intense. De nouvelles tentes sont montées pour accueillir un plus grand nombre de patients. Une fabrique de meubles s’est improvisée à l’entrée et nous achetons les lits au fur et à mesure qu’ils sont construits. Notre équipe médicale s’agrandit et nous recrutons continuellement pour être en capacité de recevoir des centaines de nouveaux patients chaque jour.
Il y a pourtant toujours des raisons d’espérer. Une petite fille avait été admise dans un état si critique que personne n’osait imaginer qu’elle survivrait plus de quelques heures. Aujourd’hui, elle est bien en vie et complètement rétablie. Voilà pourquoi nous agissons, pour sauver le plus de vies possibles en adaptant au mieux nos activités aux besoins grandissants des familles réfugiées à Yida.