Dans une chambre fraîchement repeinte de la maternité MSF de Kuchlak, une maman d'une vingtaine d'années vient de mettre au monde son troisième enfant.
Épuisée, elle est étendue sur son lit pendant que les sages-femmes s'occupent de son petit garçon. La jeune femme est ravie d'avoir donné à son mari un fils qui pourra s'occuper de la famille.
A première vue, on pourrait croire que cet accouchement n'a rien d'extraordinaire. Mais cette jeune maman vient de survivre à un épisode qui coûte la vie à des milliers de femmes vivant dans le Balouchistan rural, la plus grande province du Pakistan, mais aussi la plus pauvre.
Ici, accoucher peut être mortel, car les femmes enceintes n'ont pas accès à temps à des soins adaptés.
En 2007, le taux de mortalité maternelle au Balouchistan atteignait le nombre inquiétant de 637 décès pour 100 000 naissances , tandis que la mortalité infantile est estimée à environ 65 décès pour 1 000 naissances .
Ces chiffres sont deux fois supérieurs au taux de mortalité maternelle moyen du Pakistan, déjà élevé avec, en 2005, 320 décès pour 100 000 naissances. A cela s' ajoute le manque d'infirmières et de sages-femmes (cinq infirmières et sages-femmes pour 10 000 habitants ).
Kuchlak est une ville de 120 000 habitants située à une demi-heure de route de Quetta, la capitale de la province du Balouchistan au sud-ouest du Pakistan. Ses habitants vivent pour la plupart dans un très grand dénuement.
Plusieurs zones de la ville, devenues résidence permanente de réfugiés afghans, ressemblent à un camp improvisé.
Depuis 2006, MSF dirige un centre de santé materno-infantile et fait partie des rares organisations à offrir des soins gratuits aux femmes et aux enfants de moins de cinq ans : des consultations prénatales jusqu'aux soins postnatals, en passant par les services obstétriques, gynécologiques, les vaccinations et les consultations généralistes. Les médecins auscultent les patients et leur fournissent gratuitement des médicaments.
En outre, un laboratoire permet d'effectuer des analyses pour diagnostiquer le paludisme, la leishmaniose cutanée, la tuberculose, l'hépatite B, le diabète et l'anémie chez les femmes enceintes.
Chaque mois 300 consultations prénatales sont délivrées, et 150 des 170 femmes qui se rendent au centre viennent pour accoucher.
Pour cette communauté vivant dans une grande pauvreté, la gratuité des soins est vitale. Ici, les femmes dont les maris sont ouvriers doivent payer des milliers de roupies pour accoucher dans un hôpital public.
Pour bénéficier d'une prise en charge adéquate, elles sont donc obligées d'emprunter à des proches ou à des voisins une somme qu'elles passeront leur vie à rembourser.
« La plupart des femmes enceintes doivent faire un trajet d'une heure ou plus pour donner naissance à leur enfant, et beaucoup d'entre elles continuent d'accoucher chez elles car elles n'ont pas d'autre choix », explique le docteur Amna Hammad, femme médecin à la maternité.
Non loin du centre de santé materno-infantile se trouve le centre de santé rural du ministère de la Santé, où MSF soutient certains services.
L'organisation y mène notamment un programme nutritionnel car les besoins sont élevés : un peu plus de 30 % des enfants de moins de cinq ans au Pakistan sont en sous-poids par rapport à leur âge. Ce programme de nutrition a permis, depuis son ouverture en 2006, de soigner quelque 1 200 enfants sévèrement malnutris.
Au Pakistan, MSF n'accepte aucun financement de la part de gouvernements ou d'organismes donateurs, elle repose uniquement sur les dons privés du public pour mener à bien son action. MSF travaille au Pakistan depuis 1998.