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Contexte

La République démocratique du Congo (RDC) est confrontée à une des crises les plus complexes, longues et aiguës au monde. L’Est du pays a été ravagé par les guerres du Congo, qui ont fait près de 6 millions de morts entre le milieu des années 1990 et le début des années 2000. À l'époque, Médecins Sans Frontières (MSF) est témoin de ces événements – violences effroyables et tueries de masses entraînant d'innombrables déplacements de populations et des situations sanitaires extrêmes – dans la région des Grands lacs, au Rwanda et au Zaïre (ex-RDC). Depuis, les affrontements entre groupes armés continuent de secouer l'est de la RDC, qui compte aujourd'hui 4,5 millions de personnes déplacées sur les plus de 5 millions recensées dans le pays. Les provinces du Sud et Nord-Kivu accueillent respectivement près d'un et 2 millions de déplacés tandis que la province d'Ituri en accueille plus de 1,6 million (HCR, 2020). 
La RDC est un des pays les plus pauvres au monde, où près d'un enfant sur dix meurt avant l’âge de cinq ans. Le système de santé congolais peine à faire face aux urgences sanitaires chroniques sur un aussi vaste territoire, où de nombreuses populations vivent dans des zones difficiles d'accès. Parmi les services qu'elles proposent dans le pays, les équipes MSF fournissent des soins de santé généraux, spécialisés et pédiatriques ; opèrent les cas de chirurgie ; mènent des campagnes de vaccination ; prennent en charge les cas de malnutrition ; se mobilisent contre les épidémies de VIH/sida, de tuberculose, de choléra, de rougeole et d'Ebola. C'est en RDC que sévit actuellement la plus importante épidémie de rougeole au monde. Le virus Ebola, quant à lui, est devenu endémique dans le pays : onze épidémies y ont été successivement déclarées depuis vingt ans. 

Principales régions d'interventions de MSF en RDC. Source : rapport international d'activités 2019
Principales régions d'interventions de MSF en RDC. Source : rapport international d'activités 2019

L'hôpital de Rutshuru, situé dans le Nord-Kivu, est l'unique hôpital à proposer des soins chirurgicaux et spécialisés dans une zone comptant près de 760 000 habitants et où les conflits entre groupes armés sont réguliers. Cette web-série en deux parties témoigne du quotidien des problématiques auxquelles sont confrontées les équipes MSF dans l'est de la RDC.

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Conséquences des cycles de violences

Malgré les accords de Sun City (Afrique du Sud) en 2002, censés mettre fin aux guerres du Congo, une multitude de conflits armés et d’affrontements intercommunautaires perdurent encore aujourd'hui, dans un pays où le système de santé est très peu fonctionnel. Les conséquences sont dramatiques pour les populations, notamment dans les provinces du Tanganyika, du Kasaï, des Kivus ou d'Ituri, qui connaissent une recrudescence des violences depuis plusieurs années.

L'instabilité et l'insécurité dans ces provinces (incursions armées, meurtres de masse, tortures, pillages, exactions, violences sexuelles, etc.) ont ainsi forcé des millions de personnes à fuir leurs terres. Ces violences engendrent des besoins directs, comme la prise en charge de blessures de guerre et de victimes de viols, mais les répercussions sur les populations sont plus larges. La prévalence de la malnutrition infantile atteint des niveaux inquiétants, notamment en raison du vol des terres et des ressources qui privent les personnes de leurs revenus. Le développement de maladies liées à l'eau, comme le paludisme, a lui aussi un effet dévastateur, qu'il faut prévenir et traiter. Par ailleurs, face aux événements traumatiques subis, les populations se retrouvent confrontées à de graves problèmes de santé mentale.

Pour protéger les populations civiles des combats entre les différents groupes armés, la Mission de l'Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (Monusco) est présente dans l'est du pays, à proximité des camps de déplacés. Les acteurs humanitaires sur place sont témoins des conditions de vie déplorables dans lesquelles vivent ces personnes : manque d'accès à l'eau potable, à la nourriture, aux produits essentiels ou encore aux médicaments. L'insalubrité et les mauvaises conditions d'hygiène dans les camps favorisent alors le développement des infections respiratoires aiguës et des maladies diarrhéiques. 

Ces dernières années, en plus du renfort aux hôpitaux pour soigner les blessures de guerre et les victimes de violences sexuelles, MSF a mis en place des centres de nutrition thérapeutique pour traiter les cas de malnutrition. Dans les centres de santé, les sites de soins communautaires et grâce à des cliniques mobiles, les équipes dispensent des consultations ambulatoires ainsi que des soins maternels et pédiatriques.  MSF mène également des activités de soutien psychologique pour accompagner les personnes souffrant de troubles mentaux. 

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Des épidémies constantes

La récurrence des conflits armés n'est pas le seul obstacle limitant l'accès aux soins de santé en RDC : le manque d’infrastructures, de personnel médical et les dysfonctionnements du système de santé rendent également difficile la réponse aux besoins des populations. Le pays s'étend sur un vaste territoire et sa géographie impose des défis, notamment logistiques, à l’intervention des équipes humanitaires. Il faut en effet parfois plusieurs jours pour atteindre les villages reculés de certaines régions, avec dans le cas de campagnes de vaccination par exemple, l’obligation de respecter la chaîne du froid pour préserver la viabilité des vaccins.

De nombreuses maladies comme le paludisme, le choléra, les fièvres hémorragiques ou la rougeole sont endémiques dans le pays. La lutte contre le paludisme en RDC est souvent présentée comme un succès depuis le début des années 2000, avec une diminution générale du nombre de cas. Pourtant, la RDC concentre toujours 12 % des cas dans le monde (OMS, 2019), et touche particulièrement les enfants. Les populations congolaises doivent également faire face à des épidémies de choléra, favorisées par la sécheresse et les déplacements de population.

Depuis des décennies, le pays est également touché par des épidémies de rougeole et la maladie connaît des résurgences majeures depuis 2010. La rougeole est particulièrement dangereuse pour les enfants de moins de cinq ans, alors qu’elle est facilement évitable grâce à la vaccination, pouvant réduire la mortalité infantile de 50 %. Extrêmement contagieuse, elle peut entraîner de multiples complications et être mortelle. En l’absence de traitement antiviral, le personnel soignant traite d'abord les symptômes, évite les complications et contrôle la fièvre des patients. MSF intervient notamment lors de campagnes de vaccination massives, en prévention ou en réponse aux urgences, pour éviter la propagation des épidémies. 

Dès 2018, les équipes MSF ont observé une augmentation inquiétante du nombre de cas de rougeole dans plusieurs provinces du pays et ont aidé le ministère de la Santé à contrôler la transmission de la maladie. L'épidémie de rougeole est officiellement déclarée par les autorités du pays en juin 2019, s'avérant la plus meurtrière depuis des dizaines d'années. Présente dans les 26 provinces de la RDC, son taux de létalité se révèle très élevé par rapport aux précédentes. Pour limiter la propagation de la maladie, MSF s'est mobilisée en urgence en lançant des campagnes de vaccination massives à travers le pays. Cette épidémie est reconnue par l'OMS comme étant la plus grande épidémie de rougeole sévissant actuellement dans le monde.  En l'espace de deux ans, elle a fait 6 600 victimes dans le pays.

Plus rares, les fièvres hémorragiques sont aussi présentes dans le pays. Une épidémie de fièvre jaune s’est propagée depuis l’Angola jusque dans les régions du sud-ouest de la RDC en 2016, puis les maladies à virus Ebola sont réapparues dans le pays. D'abord en 2018 en Équateur, puis de 2018 à 2020 dans les provinces du Nord-Kivu, de l'Ituri : c'est la dixième épidémie d'Ebola en RDC et la plus importante de son histoire. Avec un taux de létalité de 67 %, le virus a tué plus de 2 300 personnes. Les équipes MSF ont été impliquées dans plusieurs activités : soins aux patients, vaccination, renforcement des mesures d’hygiène et de contrôle des infections et sensibilisation à la maladie dans les communautés. En 2020, la dixième épidémie d'Ebola prend fin, mais une onzième est déclarée quelques semaines plus tard dans la province de l'Équateur, avec un taux de létalité toutefois inférieur à la précédente (43 %). Les foyers épidémiques sont cette fois plus sporadiques, éparpillés le long d'une vaste région fluviale. L'introduction d'un vaccin et une nouvelle approche, davantage centrée sur les soins curatifs apportés directement aux patients via des cliniques mobiles dans les communautés, semblent porter leurs fruits. Aujourd'hui, la létalité du virus reste grave, mais la maladie est néanmoins traitable, voire possiblement évitable grâce à la vaccination.