Guerre au Liban : les équipes MSF au plus près des déplacés à l’aide de cliniques mobiles

Des personnes déplacées lors d'une distribution d'eau dans le refuge d'Azarieh à Beyrouth. Liban. 11 octobre 2024.
Des personnes déplacées lors d'une distribution d'eau dans le refuge d'Azarieh à Beyrouth. Liban. 11 octobre 2024.   © Antoni Lallican/Hans Lucas

Depuis l’intensification de l’offensive israélienne au Liban, selon l’Onu, plus de 700 000 personnes se sont déplacées pour fuir les frappes aériennes ou les combats. Nombre d’entre elles ont trouvé refuge dans l’un des 800 bâtiments collectifs qui servent actuellement d’abris. Les équipes MSF, qui ont étendu leur intervention dans le pays, apportent des soins aux personnes déplacées grâce à des cliniques mobiles, notamment dans l’abri d’Azarieh, à Beyrouth.  

Alors que c'était un centre commercial animé au cœur de la capitale libanaise, Azarieh est devenu un lieu de refuge pour plus de 2500 personnes. Sur place, les déplacés ont des difficultés d’accès aux produits de première nécessité et s’inquiètent de la situation. 

Imad Hachem, 55 ans, vit à Azarieh depuis plusieurs semaines avec sa femme, sa sœur, son fils et son cousin. Ils ont rapidement quitté la banlieue sud de Beyrouth, après qu’ils ont compris que la situation sécuritaire risquait de se dégrader, à la suite de la mort d’Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah. Il leur a fallu plusieurs jours pour trouver des matelas et des couvertures et, aujourd’hui, ils survivent uniquement grâce à la distribution régulière de nourriture. L’arrivée de l’hiver préoccupe la famille. L’état de santé de leur cousin qui souffre d’un cancer également. Il a été obligé d’interrompre son traitement : « Nous recevions ce traitement coûteux du ministère de la Santé, mais maintenant nous ne savons pas comment nous le procurer. » Imad a pu retourner voir son quartier quelques jours plus tôt. Après avoir constaté que leur maison n’avait pas été détruite, il espère pouvoir y revenir un jour. « Je ne veux pas quitter le Liban, mais j’ai un fils et une femme dont je dois m’occuper. Si le seul moyen de retrouver la stabilité est de partir, alors nous partirons. »  

Imad, à gauche, et Abbas, à droite, avec son enfant, dans le refuge d'Azarieh à Beyrouth.
 © Antoni Lallican/Hans Lucas
Imad, à gauche, et Abbas, à droite, avec son enfant, dans le refuge d'Azarieh à Beyrouth. © Antoni Lallican/Hans Lucas

Les conditions de vies dans le refuge d’Azarieh sont désastreuses, comme dans de nombreux abris du pays. En effet, le bâtiment n'a pas été conçu pour accueillir des personnes à long terme. Pour répondre aux besoins médicaux urgents de ces personnes déplacées, MSF a déployé une clinique mobile. Elle fournit des soins de santé primaire et un soutien psychologique, en particulier aux enfants. Les équipes MSF distribuent également des biens essentiels, comme des produits d'hygiène, des matelas et des couvertures. 

Après y avoir passé deux semaines, Ezdihar Al Diqar explique qu'elle ne se sent pas en sécurité dans le refuge. Elle ne sait plus où aller pour être à l'abri des bombardements : « J'ai entendu une forte explosion hier, lors d’une frappe israélienne dans le centre de Beyrouth. C'était à moins de deux kilomètres de notre refuge. » En tant que femme, Ezdihar a aussi le sentiment qu’elle doit prendre des mesures de sécurité supplémentaires, comme limiter ses déplacements à l’extérieur du refuge et verrouiller la porte du petit espace réservé à sa famille à l’intérieur du refuge. En tant que mère, elle voit aussi les conséquences néfastes de la guerre sur ses enfants. « Ma fille n’a que 14 ans, mais malgré toutes les difficultés que nous avons dû surmonter, elle réagit souvent, notamment dans le cas des frappes aériennes, avec une maturité qui dépasse son âge. Elle a dû grandir vite. » 

Zeinab Ozeir, accompagnée de deux de ses enfants, dans le refuge d'Azarieh à Beyrouth. 
 © Antoni Lallican/Hans Lucas
Zeinab Ozeir, accompagnée de deux de ses enfants, dans le refuge d'Azarieh à Beyrouth.  © Antoni Lallican/Hans Lucas

Pour nombre de ces habitants, le refuge d’Azarieh est une alternative à la rue. Abbas, 28 ans, a été obligé de dormir dehors plusieurs nuits avant de s’installer à Azarieh, où il habite depuis 18 jours. Il est inquiet pour son fils, âgé de seulement huit mois : « Amir a de la fièvre et il est souvent malade depuis que nous sommes ici. Nous manquons de nourriture. Il pleure de plus en plus souvent. Je pense qu'il est conscient de ce changement d'environnement et de l'insécurité dans laquelle nous vivons, notamment à cause du bruit des bombardements. » 

L’incertitude et la peur pour l’avenir sont partagées par bon nombre de résidents, qui, comme Zeinab Ozeir, craignent pour leur famille. « Je ne peux plus imaginer l’avenir ici. Même si la guerre se termine, que restera-t-il de notre maison ? Ma famille et mes amis survivront-ils ? » Bien qu’elle ait vécu la guerre de 2006, elle juge la situation actuelle beaucoup plus inquiétante. Elle vit désormais dans une pièce de dix mètres carrés avec son mari et ses quatre enfants, âgés de deux mois à huit ans. La guerre met à rude épreuve la santé psychologique de chacun d’entre eux et Zeinab décrit des nuits remplies de cauchemars et de réveils au moindre bruit.  

Lorsqu’une bombe israélienne a frappé un bâtiment à deux kilomètres du refuge la veille, ses enfants lui ont demandé de déménager dans un endroit plus sûr. Avec son mari, ils envisagent de quitter le Liban, quelle que soit la destination, tant que leurs enfants sont en sécurité et qu’ils peuvent espérer un avenir paisible. 

Les équipes MSF continuent de déployer des cliniques mobiles en soutien aux personnes déplacées, tout en acheminant du matériel médical vers le Liban. La semaine dernière, l’association en a envoyé 45 tonnes depuis Chypre.