Le témoignage de Géraldine, Haïtienne et travailleuse MSF

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© Jean-Marc Jacobs

Comme des milliers d'autres Haïtiens, Géraldine Augustin a commencé à secourir les gens juste après le séisme.  Jeune étudiante en médecine, Géraldine vient tout juste de rejoindre MSF.Elle appartient aux quelque 1500 haïtiens employés par MSF à travers le pays qui rendent possible nos activités médicales. Géraldine travaille dans une structure de soins post-opératoires et nous raconte sa vie et son travail après le tremblement de terre.

« Je m'appelle Géraldine Augustin et je termine mes études de médecine. Le 12 janvier, j'étais sur le chemin de l'université. Soudain, la terre s'est mise à trembler et juste après toutes les maisons se sont écroulées, il y avait des morts et des blessés partout. J'ai eu assez de chance pour être épargnée mais ma mère a été tuée.

Comme c'était la première fois que Haïti vivait un événement pareil, personne n'a compris ce qui se passait.

Le jour qui a suivi le séisme, alors que je pleurais encore la disparition de ma mère, j'ai pris tous les médicaments que j'avais, j'ai trouvé quelqu'un qui avait une voiture et je suis partie soigner les gens qui avaient besoin d'aide. Partout il y avait des blessés.

J'ai rencontré une équipe MSF et ils m'ont dit que je pouvais leur envoyer les cas les plus graves. C'est comme ça que je suis entrée en contact avec eux.

Et puisque MSF et moi faisions la même chose, j'ai pensé que je devais me joindre à eux. C'est ce que j'ai fait environ deux semaines après. Comme je n'ai pas encore mon diplôme de médecin, je suis employée en tant qu'infirmière. Je vois des patients qui souffrent énormément et la plupart d'entre eux sont traumatisés.

Avec MSF, nous travaillons tous les jours, non-stop. Nous faisons tout notre possible pour sauver des vies, pour aider ceux qui en ont besoin. Il y a beaucoup de blessés, de gens qui ont dû être amputés ou qui sont très fragilisés psychologiquement. Toutes ces personnes ont trouvé à MSF des soins adaptés.

C'est très difficile pour moi car j'ai perdu ma maman dans la catastrophe et que je n'ai plus de maison. Nous vivons désormais en plein air et essayons de nous adapter à la situation mais je ne pense pas que nous y parviendrons jamais. C'est dur pour tout le monde! Tous ont perdu un proche, c'est difficile pour tout le monde. Personne n'oubliera jamais ce mardi 12 janvier.

Les infirmiers et le personnel qui travaille ici ont tous été victime du tremblement de terre. Ce sont des professionnels et ils cherchent des lieux où ils pourront soigner des blessés mais eux-mêmes vivent dans des conditions terribles.

Moi, j'habite sur un terrain vague et pour l'instant je n'ai pas de tente, je vis en plein air. Il y a encore des cadavres sous les décombres, il n'y a pas de sanitaires et ça sent très mauvais. L'accès à l'eau potable pose également problème mais désormais, MSF distribue de l'eau dans notre zone et ça s'améliore.

Quand je travaille de nuit, j'ai besoin de dormir la journée, mais c'est vraiment difficile à cause du soleil et, la nuit venue, lorsqu'il pleut c'est vraiment pénible.

Les patients de l'hôpital sont constamment sur leurs gardes, ils croient qu'un autre séisme peut survenir à tout moment. Ils se demandent s'ils vont mourir, s'ils ont encore un avenir. Même sous les tentes de l'hôpital, les gens nous demandent si celles-ci peuvent s'effondrer sur eux en cas de nouveau tremblement de terre. Et je leur répond : »bien sûr qu'elles tiendront'.

Le personnel haïtien est très important dans ce projet. Comme les patients nous sommes nous-mêmes des victimes du séisme et nous pouvons comprendre ce qu'ils ressentent. Parce que nous avons la même culture et parlons la même langue que les patients nous sommes à même d'identifier ce dont ils souffrent. Nous sommes proches d'eux.

Je ne sais pas si je serai capable de retourner à l'école de médecine. Premièrement, mon université s'est effondrée donc je ne sais pas ce qu'elle va devenir. Ensuite, c'est ma mère qui prenait en charge mes frais de scolarité. Et maintenant qu'elle est décédée, je ne sais pas si je pourrais me permettre de les payer. Je vais essayer de trouver une bourse pour pouvoir continuer mes études de médecine.

Devenir médecin et sauver des vies est mon rêve. Quoiqu'il arrive par la suite, je continuerai de travailler dans des dispensaires mobiles pour aider les gens dans les campagnes.

Dossier "Tremblement de terre en Haïti"

Retour au dossier consacré aux interventions de MSF en Haïti après le séisme du 12 janvier 2010.

Notes

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