Mohamed a toujours rêvé de faire carrière dans une équipe internationale de football. À l'âge de 17 ans, il était capitaine de l'équipe junior nationale de Syrie, mais également le plus jeune joueur de l'équipe. Il était attaquant, numéro 10 de l'équipe, et avait marqué le nombre impressionnant de 64 buts en 52 matchs. Mais, le 15 avril, il laisse tout tomber et fuit la Syrie en risquant le tout pour le tout à bord d'une embarcation délabrée, dans l’espoir de traverser la Méditerranée.
« Où est passée notre star ? », « Notre star n'aurait pas dû nous laisser comme ça », « Il est parti en Allemagne » font partie des posts que l'on peut lire sur la page Facebook de Mohamed, à côté de photos et de vidéos montrant ses prouesses sur le terrain de foot.
Au début, Mohamed était tellement pris par le football qu'il ne prêtait pas beaucoup attention à la guerre. Mais le conflit n'a pas tardé à empiéter sur son quotidien. Alors qu'il prenait le bus pour se rendre à ses séances d'entraînement, les explosions se faisaient de plus en plus fréquentes. Lorsqu'elles se produisaient, lui et les autres passagers se jetaient par terre, entre les sièges. Un jour, une bombe explosa sur le terrain de football en plein milieu d'un match, entraînant la mort d'un de ses coéquipiers. Mohamed s'est alors rendu compte qu'il ne voulait plus continuer.
Dans le même temps, le dix-huitième anniversaire de Mohamed approchait et apportait avec lui la perspective d'être enrôlé de force dans l'armée syrienne. « Nous avons décidé de quitter la Syrie pour protéger l’avenir de Mohamed », explique son père.
Accompagné de son père et de son oncle, Mohamed a franchi la frontière avec la Turquie et fait route vers la ville portuaire de Mersin, à l'est de la Méditerranée. Ce trajet, de quelques centaines de kilomètres seulement, nécessita 24 heures d’un voyage très dangereux, contraignant ces trois hommes à traverser la montagne à pied, négocier leur transport et éviter les trafiquants d'êtres humains, le tout sur fond de coups de feu et d'explosions.
À Mersin, ils trouvèrent une embarcation pour les amener en Europe : un vieux navire marchand, dans lequel ils furent parqués avec des centaines d'autres Syriens. Dès le deuxième jour, le bateau commença à prendre l'eau. Les trois hommes furent secourus alors que le bateau était presque entièrement submergé. Il s'écoula encore cinq jours avant qu'ils ne débarquent en Sicile.
Mohamed est assis sur un lit de camp au centre d'accueil des migrants de Pozzallo, entouré de familles syriennes. Sur le mur derrière lui sont accrochés des dessins, des messages écrits en arabe, des drapeaux syriens et une photo d'un bateau en train de couler avec la légende « le bateau de la mort ».
Le regard de Mohamed, sérieux et déterminé, montre que, malgré toutes les difficultés, il ne renoncera pas si facilement à ses ambitions. « J'espère que les clubs européens liront mon histoire et m'aideront à réaliser mon rêve lié au football, confie Mohamed. J'aimerais aller en Allemagne et jouer au Borussia Dortmund, ou en Espagne, au Real Madrid. Je ne peux pas retourner en Syrie, j'ai l'impression d'être un déserteur ».
Quelqu'un apporte un ballon. Mohamed commence à dribbler avant de faire rebondir le ballon sur sa tête puis de le transférer avec beaucoup d’habileté sur son pied, son genou puis son épaule. Un cercle se forme autour de lui. Les spectateurs tapent dans les mains et l'encouragent en criant. Pour la première fois, Mohamed sourit.
Activités de MSF en Sicile
Plus de 35 000 migrants ont traversé la Méditerranée pour rejoindre l’Italie entre janvier et la mi-mai 2015. L’an dernier, plus de 170 000 migrants avaient atteint les côtes italiennes.
Bon nombre des personnes secourues alors qu'elles se trouvent à bord de bateaux surchargés pouvant à peine naviguer sont débarquées en Sicile. Dans le port de Pozzallo, dans la province de Raguse, au sud de l’île, les migrants sont accueillis par une équipe de MSF en collaboration avec le personnel du ministère italien de la Santé. L'équipe MSF, composée de docteurs, d'infirmières et de médiateurs culturels, contrôle l’état de santé des nouveaux arrivants et leur fournit une assistance médicale, à la fois au cours des heures suivant leur arrivée et pendant leur séjour au premier centre d'accueil.
Dans le deuxième centre d'accueil situé dans la province de Raguse, où les migrants attendent la réponse à leur demande d'asile, une équipe de santé mentale MSF apporte un soutien psychologique à ceux qui en ont besoin. L’équipe propose des consultations individuelles ainsi qu'un soutien à plus long terme, et oriente vers un psychiatre les personnes atteintes de graves problèmes mentaux.
En 2014, les équipes MSF en Italie ont contrôlé la santé de 26 081 migrants nouvellement arrivés. Elles ont procédé à 2 594 examens médicaux et 700 évaluations psychologiques. Au cours des trois premiers mois de 2015, elles ont effectué 1 349 dépistages et 566 examens médicaux.