Comment peut-on décrire la situation actuelle à Charsadda?
La moitié de la ville et de nombreuses maisons de la zone ont été inondées. Beaucoup se sont réfugiés sur les toitures des bâtiments encerclés par les eaux. Ceux qui en étaient capables ont nagé pour rejoindre la terre ferme, où ils ne pouvaient qu'attendre qu'on porte secours aux femmes, enfants et personnes âgées de leur famille. Heureusement, ces deux derniers jours, la pluie a cessé dans cette région, et l'eau a commencé à se retirer dans certains endroits.
Cela permet-il un meilleur accès?
Absolument. Nous pouvons maintenant atteindre davantage de personnes dans plus d'endroits isolés. Le territoire inondé est toutefois très vaste... La population de ce secteur est d'environ un million de personnes. Nous sommes encore loin de pouvoir identifier les besoins précis des habitants.
Quelles sont les priorités?
Selon nos évaluations dans le secteur, les besoins les plus urgents de la population sont l'eau potable, la nourriture et l'aide médicale. Des milliers d'entre eux sont sans domicile ou se sont réfugiés à l'intérieur des bâtiments abandonnés ou des écoles. Ils n'ont pas d'eau potable, rien à boire et très peu à manger. La boue omniprésente rend leurs conditions de vie insalubres et constitue un problème majeur.
Quel travail accomplissent vos équipes?
L'eau est notre priorité. Nous travaillons pour en améliorer la qualité. Lorsque c'est possible, nous apportons de l'eau potable aux gens par camion. Les équipes d'assainissement de l'eau s'efforcent de chlorer les points d'eau contaminés. Dans le secteur de Charsadda, nous utilisons aussi 21 véhicules plus petits pour acheminer de l'eau dans des endroits difficiles à atteindre, où souvent personne ne s'est encore rendu. Hier, nous avons distribué 30 000 litres d'eau dans cette région. Nous nous apprêtons aussi à distribuer des kits d'hygiène comprenant des seaux, du savon, des serviettes, des brosses à dents, ainsi que d'autres articles de première nécessité comme des couvertures, des matelas, des bidons, des bâches en plastique, des moustiquaires et des ustensiles de cuisine. Les soins médicaux sont également une priorité. Nous avons donc formé deux équipes médicales. Elles se rendent deux fois par semaine dans six endroits où les besoins en soins médicaux sont importants.
Quels types de problèmes médicaux constatent-elles?
Il y a beaucoup d'infections respiratoires et cutanées, et la prévalence de la diarrhée augmente. Nos équipes s'occupent aussi des malades chroniques, comme les diabétiques qui ont parfois perdu leurs médicaments pendant l'inondation. On a constaté de nombreux cas de traumatismes physiques dans les centres médicaux, des habitants qui par exemple ont été emportés par l'inondation ou blessés lorsque leur maison a été endommagée.
Y a-t-il un risque d'épidémie ?
Nous travaillons dans une région où le choléra est endémique. La période de juillet à novembre est celle où les risques de contamination sont les plus élevés. Or, la majeure partie des réserves en eau de la ville se sont mélangées aux eaux de crue ou aux eaux usées. Les personnes qui vivent sur la terre ferme n'ont pas accès à l'eau potable car les puits ont été contaminés et les conditions d'hygiène sont déplorables. Propice à l'expansion de la maladie, la situation actuelle n'est donc pas sans risque.
Comment réagit la population sinistrée?
La frustration des gens est évidente. Ils savent que l'aide est à leur porte, mais qu'elle est bien insuffisante vu l'importance de la catastrophe, en particulier en ce qui concerne l'eau potable. Nous faisons notre possible pour venir en aide à un maximum de gens, mais nous sommes la seule organisation sur place à Charsadda, et l'ampleur de la catastrophe rend les choses difficiles. Beaucoup de personnes sont également en état de choc. Elles redoutent de nouvelles inondations et craignent pour leur vie.
Dossier spécial inondations au Pakistan