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RDC : 3 questions sur l'intensification du conflit armé au Nord et au Sud-Kivu

Des personnes arrivent au port de Kituku à Goma. Ils fuient les combats en cours dans le Nord et le Sud-Kivu.
Des personnes fuyant les combats en cours dans le Nord et le Sud-Kivu arrivent au port de Kituku à Goma. RDC, janvier 2025. © Moses Sawasawa

Depuis plusieurs semaines, le conflit opposant le groupe armé M23/AFC à l’armée congolaise, soutenus par leurs alliés respectifs, a repris avec une intensité accrue dans la province du Nord-Kivu, et s’est étendu à la province voisine du Sud-Kivu. Emmanuel Lampaert, représentant de Médecins Sans Frontières (MSF) en République démocratique du Congo (RDC), fait le point sur le contexte et la réponse de MSF.

Quelle est la situation actuelle au Nord et Sud-Kivu à la suite de l’intensification du conflit ?

Depuis décembre 2024, plusieurs fronts ont été ouverts dans les deux provinces pour le contrôle de plusieurs positions clés. Dans le territoire de Lubero, au Nord-Kivu, le conflit a repris dès décembre, avec des déplacements de population massifs. Cela s’est poursuivi dans le territoire de Masisi, où d’intenses combats ont eu lieu en janvier 2025, notamment pour le contrôle de la ville de Masisi Centre, avant de descendre vers le Sud-Kivu, à Minova et Numbi dans le territoire de Kalehe.

Carte des projets réguliers et d'urgence de MSF au Nord et au Sud-Kivu, RDC, janvier 2025.
 © MSF
Carte des projets réguliers et d'urgence de MSF au Nord et au Sud-Kivu, RDC, janvier 2025. © MSF

Au cours des hostilités, le M23/AFC est parvenu à prendre le contrôle de plusieurs villes et, depuis quelques jours, les combats se rapprochent de Goma, la capitale provinciale, avec des affrontements intenses à Sake, à une vingtaine de kilomètres à peine de la ville. Depuis Goma, on entend régulièrement les détonations d’artillerie. Les combats ont lieu sur tous les axes entourant Goma. Ils ont entraîné un nouvel afflux de déplacés vers la ville, y compris depuis certains camps en périphérie.

Quel est l’impact des combats sur la population ?

Les conséquences humanitaires sont très lourdes sur la population. Des centaines de milliers de personnes ont à nouveau fui les affrontements. D’après les Nations Unies, elles seraient déjà 400 000 depuis janvier ; des dizaines de milliers d’entre elles se sont rendues dans les sites de déplacement autour de Goma, où vivaient déjà plus de 650 000 personnes, épuisées par près de trois années de combats. Ces sites sont totalement insalubres, comme nous en témoignons depuis longtemps : les familles y survivent sans abri convenable et manquent de tout, nourriture, eau, soins.

Les personnes vivant dans les camps, comme celui de Nzulo, fuient vers Goma alors que les combats se déroulent à quelques kilomètres de là. RDC, janvier 2025.
 © Moses Sawasawa
Les personnes vivant dans les camps, comme celui de Nzulo, fuient vers Goma alors que les combats se déroulent à quelques kilomètres de là. RDC, janvier 2025. © Moses Sawasawa

Malheureusement, des roquettes sont tirées près de ces camps et de structures de santé où les gens sont venus chercher un abri. C’est terrible et inacceptable. Nous constatons un taux très inquiétant de civils parmi les centaines de blessés que nous aidons à prendre en charge. Certains sont victimes de balles perdues, d’autres du non-respect des règles élémentaires des conflits par les belligérants. A Masisi, l’hôpital que nous soutenons a par exemple essuyé des tirs alors que plus de 10 000 personnes s’y étaient réfugiées pour leur sécurité. Deux personnes ont été blessées juste devant l’hôpital et deux de nos employés ont été touchés par un tir de roquette. La présence de combattants ou de postes d’artillerie à proximité directe de centres de soins et des camps de déplacés met en danger la vie des civils. Chacun doit se rappeler que même la guerre a des règles.

Quelle est la réponse de MSF sur place ?

Nous faisons le maximum pour maintenir à la fois nos activités régulières et d’urgence, mais dans plusieurs localités, nous avons dû limiter les risques encourus en réduisant nos équipes. Autour de Goma, par exemple, les violences des derniers jours ont réduit notre capacité à nous y rendre, même si nous continuons, dès que les conditions le permettent, d’approvisionner certaines structures médicales. Nous les préparons également à gérer les afflux de blessés et apportons du carburant pour faire tourner les pompes à eau. Cela permet à ces établissements de continuer à fonctionner, même avec une présence plus limitée de nos équipes.

Les personnes vivant dans les camps, comme celui de Nzulo, fuient vers Goma alors que les combats se déroulent à quelques kilomètres de là. RDC, janvier 2025.
 © Moses Sawasawa
Les personnes vivant dans les camps, comme celui de Nzulo, fuient vers Goma alors que les combats se déroulent à quelques kilomètres de là. RDC, janvier 2025. © Moses Sawasawa

Les hôpitaux de Goma sont totalement débordés par le nombre de blessés. Nous continuons d’y soutenir l’hôpital de Kyeshero afin de prendre en charge une partie des blessés et soulager le Comité International de la Croix-Rouge (CICR), qui est en première ligne dans leur prise en charge à l’hôpital de Ndosho. 

Dans le reste du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, malgré les défis sécuritaires et logistiques ainsi que les restrictions de mouvements, nous maintenons notre présence et poursuivons la prise en charge des patients. En trois semaines, près de 400 blessés ont été pris en charge à l'hôpital général de référence de Minova, au centre hospitalier Numbi et à l’hôpital général de référence de Masisi. Nous soutenons aussi les personnes déplacées dans des zones plus reculées, comme dans le Lubero où nous travaillons à l'amélioration de l'accès à l'eau dans les structures de santé et dans le site de déplacés de Magasin.

Notes

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